Supprimer l’impôt anticipé ne créera pas de ruissellement

Votation • La gauche et les syndicats ne veulent pas de la suppression de l’impôt anticipé, soumis en votation le 25 septembre prochain.

Rebelote. Tout juste 7 mois après que le peuple a refusé la fin du droit de timbre sur l’émission et le négoce de titres, on remet le couvert. Le 25 septembre, les électeurs et électrices seront appelés à se prononcer sur la suppression de l’impôt anticipé et du droit de timbre dit « de négociation ». A Genève, la Plate-forme pour la Justice sociale, qui regroupe Alternative et syndicats, a lancé à la mi-août sa campagne de refus de ces « nouveaux cadeaux fiscaux en or massif ».

Rappelons que tout le monde paie aujourd’hui un impôt anticipé de 35 % sur les intérêts de la fortune (comptes bancaires, titres et obligations, gains de loterie). Il pousse les contribuables à déclarer correctement leurs avoirs afin de se voir rembourser cet impôt anticipé. « Le lobby bancaire a voulu que l’impôt anticipé continue d’être perçu sur les intérêts des comptes bancaires détenus par des personnes privées en Suisse. En revanche, il doit être supprimé sur les intérêts des emprunts et les personnes étrangères ne devront plus y être assujetties ! Une situation intolérable et incohérente, qui favorisera la fraude fiscale », estime Sylvain Thévoz du Parti socialiste. En faisant ses calculs, la Plate-forme estime que les pertes seront massives pour les collectivités publiques. « Au niveau fédéral, on estime à 1 milliard la perte la première année, puis ce seront des pertes de plusieurs centaines de millions auxquelles il faut s’attendre chaque année. En supprimant cet impôt, on fait une faveur aux plus riches », précise Bernard Clerc de SolidaritéS- Ensemble à Gauche.

Transfert du travail vers le capital

« Cette double suppression d’impôts bénéficiera aux multinationales, mais non aux PME. De plus, c’est le peuple qui devra payer la facture, puisqu’il est prévu une hausse de 0,4 % de la TVA dans le cadre d’AVS 21. Nous avons aussi besoin d’argent pour financer la transition écologique », renchérit Pierre Eckert des Vert.e.s. La Plate-forme conteste aussi les affirmations du chef du Département fédéral des finances, Ueli Maurer. Celui-ci soutient que cette suppression ne touchera que 5 % de la totalité de cette taxe et qu’à terme, des emplois seront créés, du fait que les entreprises de la place émettront leurs obligations en Suisse plutôt qu’à l’étranger. « Aucun chiffre ni aucune étude ne sont avancées pour étayer ces déclamations. Simplement on veut faire croire encore une fois à l’automatisme idéologique du ruissellement. Plus les détenteurs de capitaux pourront s’enrichir et plus toute la pyramide sociale en profitera », dénonce Tobia Schnebli, président du Parti du Travail genevois. « Dans les faits, l’abolition pure et simple de l’impôt anticipé sur les obligations pour les investisseurs étrangers et les sociétés anonymes se fait au détriment de l’intérêt général », martèle-t-il. « Le Parlement est complètement à côté de la plaque, alors que pointent des crises énergétique, climatique ou sanitaire », résume Pablo Cruchon de Résistons !

Pour les syndicats, la cause est entendue, la réforme obéit à une tactique du salami, tranche par tranche vers le moins-disant fiscal. L’abandon de l’impôt sur la valeur locative est dans l’air. « Il s’agit d’une redistribution à l’envers : cadeaux fiscaux aux plus riches d’un côté, augmentation de la TVA et baisse de rentes pour les salariés de l’autre. Alors que l’inflation et la hausse de primes maladies frappent durement les travailleurs et les retraités », rajoute Davide De Filippo, président de la CGAS. « Une fois de plus, la droite sert la soupe aux détenteurs du capital qui ont massivement bénéficié de la Réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA). Il s’agit d’un transfert du travail vers le capital », conclut Jean Burgermeister d’Unia.