Le Grœnland au fil du temps

Expo • « Qanga », une exposition sur le Grœnland d’autrefois et d’aujourd’hui à découvrir jusqu’au 29 janvier 2023 au Palais de Rumine à Lausanne

Vue de l’exposition lausannoise.Gabrielle Lechevallier

En kalaallisut, langue du peuple Inuit, le peuple autochtone du Grœnland, « Qanga » signifie « autrefois ». C’est là l’objet d’une exposition du même nom, que l’on peut visiter actuellement à Lausanne. L’exposition Qanga, fruit d’une collaboration avec le Musée national du Danemark et du Grœnland, permet de découvrir l’histoire naturelle et humaine de la plus grande île du monde, au travers d’une impressionnante collection d’artefacts archéologiques et historiques, d’animaux, de minéraux et d’autres objets, issus de collections danoises et suisses, remarquablement bien présentés – et dont beaucoup n’ont jamais été montrés au public –, le tout rythmé par des extraits de quatre bandes dessinées réalisées par le dessinateur et artiste grœnlandais Konrad Nuka Godtfredsen.

Au fil de l’exposition, on peut explorer l’histoire géologique du Grœnland, sa faune et sa flore ; son histoire humaine, depuis les premières traces attestées de la présence de chasseurs-pêcheurs il y a 4’500 ans ; le mode de vie, la culture, les croyances du peuple inuit d’avant la colonisation – on apprend ainsi que « kayak » et « anorak » sont des mots empruntés au kalaallisut – ; la tentative de colonisation viking au Grœnland, qui dura tout de même plus de deux siècles ; la colonisation danoise enfin, les changements socio-économiques, l’impact du commerce avec le Danemark, mais aussi les ravages infligés à la culture inuite et l’évangélisation imposée au peuple grœnlandais.

Malgré son nom, Qanga ne porte pas que sur le passé. On y trouve aussi un aperçu du Grœnland d’aujourd’hui, un territoire autonome sous souveraineté danoise, dont les quelques 55’000 habitants luttent pour se libérer des séquelles de la colonisation, reconquérir leur propre culture, et aspirent à l’indépendance. On y apprend enfin les enjeux liés au réchauffement climatique auxquels est confronté le Grœnland, et ceux auxquels il pourrait faire face à l’avenir. Un problème majeur, même si la situation particulière au Grand Nord pour ce qui est du changement climatique n’est pas forcément très connue par chez nous.

Ecosystème boulversé

Plus que la plupart des régions du monde, l’Arctique est aujourd’hui touchée par le réchauffement climatique. Les banquises fondent, le permafrost dégèle et la forêt évince la toundra. Ce n’est pas une bonne nouvelle. C’est même une catastrophe pour l’extrême-nord de notre planète. Car la faune, terrestre et maritime, ne parvient pas à s’adapter à un changement aussi rapide. C’est tout un écosystème qui est dramatiquement bouleversé et donc aussi le mode de vie de peuples qui existent en symbiose avec lui. Au Grœnland, la banquise fond à toute vitesse et de vastes régions en pourraient être submergées d’ici quelques décennies.

Mais cette tragédie est vue comme une opportunité par quelques-uns, une opportunité de profits supplémentaires. Le Grœnland possède en effet des ressources minières, des terres rares, du pétrole…qui deviennent accessibles maintenant que la banquise disparaît. Le peuple grœnlandais doit aujourd’hui se battre contre ces velléités extractivistes, qui auraient pour effet d’aggraver le réchauffement climatique et d’endommager plus encore un écosystème fragile. Un gouvernement, qui voulait autoriser l’ouverture d’exploitations minières pour extraire des terres rares, a ainsi été renversé sous la pression populaire. Une sélection de livres en vente sur le Grœnland et de littérature grœnlandaise contemporaine est à disposition pour qui souhaiterait en savoir plus.

Une exposition qui mérite d’être visitée, parce qu’elle est passionnante et instructive et parce que le sort et les luttes du peuple du Grœnland nous concernent.